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Entretien avec Stéphane Beauverger, troisième partie

 

 

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Suite et fin de l’entretien avec Stéphane Beauverger (lire les première et deuxième parties). Je remercie vivement Corinne Billon de m'avoir permis de reproduire quelques unes de ses illustrations. À signaler, sur le blog Systar, le bel article, enthousiaste et éclairant, de Bruno Gaultier sur Chromozone.

 

 

ON : Ton prochain roman est une uchronie maritime… Tu m’as dit t’être beaucoup documenté, avoir lu et relu nombre de récits de piraterie, vu et revu nombre de films… Par ailleurs, ton personnage Cendre, dans La Cité nymphale, relit Moby Dick. Doit-on alors s’attendre à un pur récit d’aventures, flamboyant et, tout de même, un peu tordu (après tout, c’est une uchronie !), ou à un texte plus métaphysique, comme le chef d’œuvre de Melville ?... L’un n’exclut pas l’autre bien sûr, mais…

 

SB : C’est un vieux rêve d’écrire une histoire de pirates. Ca fait partie de mes premières lectures personnelles, et c’est un sujet sur lequel je me documente depuis des années. Je pense que ça prendra l’aspect d’un grand récit d’aventures, sinon flamboyant, du moins picaresque, avec ce qu’il faut de rebondissements et de coups de théâtre, tadam ! Ensuite, comme une bonne dose de remaniement historique est au programme, je ne cache pas qu’il y aura quelques surprises tordues… Sans doute pas un texte métaphysique, donc, mais comment ne pas parler du goût de la liberté et de vision libertaire quand on aborde le thème de la piraterie caraïbe ? Comme pour mes romans précédents, et sans doute ceux à venir, ce sera d’abord pour moi la satisfaction de raconter une histoire. Si au passage, je peux glisser deux ou trois questions qui me tarabustent…

 

ON : Chromozone laissait transparaître l’influence de John Brunner (Tous à Zanzibar), et, peut-être, de Norman Spinrad (Rock machine), voire de Maurice G. Dantec (Les Racines du Mal). Quelles sont tes principales références, dans les littératures de l’Imaginaire ? 

 

SB : Quel talent d‘exégète tu viens de révéler : tu les as cités d’entrée. Jack Barron et l’éternité et Rock Machine de Spinrad, L’Orbite déchiquetée, Tous à Zanzibar, Sur l’Onde de Choc de Brunner, voilà des bouquins qui m’ont marqué quand j’étais ado. Lovecraft aussi, bien sûr, Tolkien, évidemment. Plus tard, il y aura aussi Bruce Sterling, K.W. Jeter, John Varley, Roger Zelazny, Serge Brussolo, Peter Straub, Clive Barker. Beaucoup plus récemment, James Morrow. C’est un peu court, mais voilà des auteurs de l’imaginaire qui m’ont marqué, dans la mesure où je relis régulièrement leurs bouquins. Spinrad et Brunner, demeurant mes références premières. Maintenant que j’ai un orteil dans la cathédrale, j’ai même osé demander à ce cher Norman de me dédicacer mon exemplaire des Années Fléaux pendant la dernière grand-messe des Utopiales. Bon, j’en oublie forcément, mais voilà les premiers noms qui me viennent à l’esprit.

 

ON : Et hors de l’Imaginaire ?... Tu as cité quelque part Kawabata, Calvino, Ellroy…

 

SB : Je viens de réaliser que je n’avais cité ni Richard Canal ni George Alec Effinger dans la liste précédente, honte à moi ! Sinon, hors de l’imaginaire… Encore une fois, il y en aurait tellement. Kawabata, Calvino – même si ce dernier aurait sa place aussi dans la liste précédente –, Ellroy, mais aussi Jim Thompson, Charles Bukowski, Frédéric Fajardie, Edogawa Ranpo, Shakespeare… Le grand bazar des livres qui s’empilent en strates dans ma bibliothèque. Et encore, je ne me plains pas : depuis que je suis entré dans le circuit « professionnel », que je prends le temps de discuter avec les lecteurs que je croise en dédicace ou dans les salons, j’en ai découvert plusieurs spécimens d’une variété que je n’avais jamais rencontrée. Je les appelle affectueusement les lapins blancs, toujours en retard sur le programme. Ce sont des gens qui achètent tellement plus de livres qu’ils n’ont de temps pour les lire qu’ils se retrouvent avec des listes d’attente d’un an, deux ans, voire plus, entre l’instant de l’achat et celui de la lecture. Ça me fascine. D’autant plus que je les revois régulièrement, et qu’ils continuent à acheter pendant qu’ils s’efforcent de rattraper leur retard. Le tonneau des Danaïdes, version papier. J’admire, sans réussir à comprendre. M’enfin, je dis ça, mais si ça se trouve, tu es l’un d’eux, mouah, ah, ah !

 

ON : Ah, ah ! Oui, tu as vu juste, je suis un lapin blanc ! Mais c’est un plaisir d’ouvrir enfin un livre acheté cinq ou six ans auparavant (deux ans ? Peuh ! Petits joueurs !), et qui, pendant tout ce temps, me regardait d’un œil goguenard du fond d’une pile instable ! Il y a même des écrivains dont j’ai acheté quasiment toute l’œuvre, au fil du temps, et dont je n’ai pas encore lu une traître ligne… Mais, justement, puisque nous en parlons, peut-être vas-tu m’aider à accroître ma bibliothèque : aurais-tu quelques perles d’auteurs contemporains un peu méconnus, voire franchement confidentiels, à nous conseiller ? Tiens, moi, par exemple, je viens de subir un sacré choc, avec la lecture conjointe du poème « Todesfuge » (« Fugue de Mort ») de Paul Celan, et de Kaddish pour l’enfant qui ne naîtra pas d’Imre Kertész (qui devrait vivement t’intéresser, soit dit en passant)… Pas exactement des auteurs confidentiels, mais pas des best-sellers non plus !

 

SB : Je le note. De mon côté j’ai beaucoup aimé Soie, d’Alessandro Baricco, Le Lièvre de Vatanen, d’Arno Paasilinna, Paysage peint avec du thé, de Milorad Pavic. En ce moment, je lis La Bouche de Francis Bacon de Michael Gira, que tu m’as prêté, je ne sais pas encore si j’aime, c’est trop déjanté pour une analyse en cinq mots. Et on m’a prêté aussi Premiers matériaux pour une théorie de la jeune fille, de Tiqqun, que je déguste page par page. Dans un autre genre, le manga Blame! par Nihei Tsutomu m’a beaucoup plu.

 

ON : Merci. Le seul que j’ai lu, dans ta petite liste, est La Bouche de Francis Bacon (tu ne le perds pas, surtout, hein…). Eh oui, difficile d’aimer le recueil infernal de Michael Gira, encore plus noir que la musique des Swans… Plus torturé, tu meurs !

Changeons de sujet. Tu as longtemps travaillé dans l’industrie du jeu vidéo. Quel lien fais-tu entre ces univers virtuels et ton œuvre littéraire ? Et envisages-tu d’écrire un roman sur ce thème ? Tu me disais, récemment, que selon toi aucun écrivain ne s’était vraiment attelé à la tâche. Comment t’y prendrais-tu ?

 

medium_Interlude.jpgSB : Travailler comme scénariste dans l’industrie du jeu vidéo m’a appris, je crois, à affiner mes trames narratives. Dans un jeu, tu dois être très explicite avec peu de moyens, c’est à dire qu’il n’y a pas de place pour des heures et des heures de dialogue, sauf chez les Japonais, qui se permettent de créer des jeux où il y a parfois plus de séquences cinématiques non-interactives que de séquences de jeu proprement dites. Donc, tu dois en un minimum de mots et de temps en dire le plus possible pour informer le joueur. C’est à mon avis une très bonne école. Et puis, quand tu travailles sur un jeu, c’est un boulot d’équipe très dense, où de nombreuses compétences se croisent et s’influencent. Ça aussi, c’est formateur, question rapports et conflits humains. Quand tu écris un roman, c’est juste tes doigts, ta tête et ton clavier. Je n’envisage pas d’écrire dans l’immédiat un bouquin sur cet univers, le jeu vidéo est encore un bébé vagissant, même s’il est destiné à grandir. Par contre, je travaille actuellement sur une BD qui explore l’univers des MMORPG, ces fameux massive multiplayers on-line role playing games qui sont sortis de l’ombre pour atteindre le grand public depuis deux-trois ans avec des jeux comme World of Warcraft ou Second Life. Je m’intéresse beaucoup à ce principe d’interconnections d’individus qui s’inventent des identités d’emprunt pour vivre des aventures virtuelles en commun. Quant à mon point de vue sur le fait qu’aucun écrivain ne se soit attelé à la tâche, ce n’est pas exactement ça, c’est plutôt que quand ça a été fait, c’est sous un éclairage alarmiste et dépréciatif. A mon avis, c’est dû au fait que le jeu vidéo, surtout on-line, est le cauchemar révélé d’une certaine S.-F. qui mettait en garde contre la réduction de l’individu à un spectateur passif et lobotomisé. Ce dont on a accusé la télévision il y a trente ans, le jeu vidéo l’a réussi avec une force d’addiction fortement accrue, et les parents héritiers de la pensée de 68 de voir avec inquiétude leurs mômes acquérir des comportements dont ils se sont toujours méfiés par habitude et réflexe acquis. Pour moi, c’est un combat aussi rétrograde que de clamer au milieu du XIXe siècle « Le train c’est la mort de l’homme, notre cage thoracique explosera si on dépasse les 100 km/h !! » Le véritable danger, à mon sens, c’est la dissolution de la responsabilité personnelle. L’essentiel, ce n’est pas tant de jouer, mais à quoi, et comment. Je me souviens d’une mère de famille qui m’avait appelé quand je travaillais chez Blizzard, et qui voulait que je « trouve un moyen d’empêcher sa fille de 13 ans de parler avec des garçons sur internet… » Je crois qu’elle n’a même pas compris quand j’ai essayé poliment de lui expliquer que ce n’était pas mon rôle de me substituer à son autorité parentale. Bon, je m’écarte un peu du sujet, là, mais la démission individuelle ou collective est un des sujets qui me préoccupe le plus, depuis quelques années. Je crois en apercevoir les effets pervers à tous les niveaux, de la disparition de la simple courtoisie à la caisse des supermarchés jusqu’à celle des infâmes émissions qui commencent à pulluler à la télévision, genre « Le Grand Frère » ou « Super Nanny ». Ces programmes glorifient l’abandon, la culture de l’échec, et le recours à l’autorité extérieure comme le seul recours à ses supposées incapacités. La culture de l’attelle me fait dégueuler. Le jeu vidéo est là, et pour longtemps, il ne s’agit pas de le brûler – c’est toujours suspect, un autodafé – mais de réfléchir à ce qu’on va en faire. Comme la télévision, c’est une coquille vide, remplie seulement de ce qu’on y mettra. Après, si l’humain est assez con pour tomber dans le panneau… Bon, bref, tu vois, il y a des choses à dire, et je le ferai peut-être, mais d’ici quelques temps.

 

ON : « Comme la télévision, c’est une coquille vide, remplie seulement de ce qu’on y mettra », dis-tu. Comme la télévision, ou comme l’Internet… La Toile est un lieu, ou un non-lieu, où le bruit blanc est tellement dense qu’il semble devoir tout recouvrir. Ça signifie quoi, pour toi, de donner une interview pour un blog ?...

 

SB : Ça ne « signifie » pas grand chose, sinon espérer remplir momentanément la coquille avec quelque chose de pas trop inutile ni trop inintéressant. C’est vrai qu’avec sa démocratisation, la Toile est devenue un espace de la logorrhée. Prendre la parole, certes, mais encore faut-il avoir quelque chose à dire. Attention, ne pas lire ici de propos élitiste genre « laissez parler ceux qui savent », bien au contraire. Chaque avis, chaque témoignage, chaque intervention diffuse sa valeur potentielle, du fait même de sa publication. Mais il est indéniable qu’il y a un effet « miroir aux alouettes », quelque chose entre la libération du narcissisme le plus insipide (ma vie, mon chat, mon bébé, ma maison, ma bite, ma gueule) et l’immunité trompeuse du non vis-à-vis (au lieu de dialogues, on assiste surtout à des monologues croisés). Le tout donne effectivement ce « bruit blanc » dont tu parlais plus haut. Mais, encore une fois, je n’ai pas l’impression que ça soit spécifique à la Toile , sinon en terme de volume sonore. Si tu observes notre comportement au quotidien hors du réseau, faisons-nous vraiment autre chose que de parler de nous, de nos évidentes qualités et de nos épineux problèmes ? Qui écoute vraiment ? Qui s’intéresse vraiment à ce que l’interlocuteur essaie de dire ? Si Internet accentue la tendance et la révèle, ce n’est peut-être pas plus mal, au fond. J’ai tendance à penser qu’Internet n’est qu’un révélateur de notre nature mesquine, soulignée par l’impunité de la distance. On y fait encore moins d’effort de respect ou de courtoisie qu’ailleurs.

 

ON : C’est vrai que c’est déplorable. Même si, soyons honnêtes, il m’arrive aussi, avec les indélicats ou les trolls béotiens, de sortir l’artillerie lourde et d’oublier volontairement les règles de politesse… Mais je crois qu’Internet, tel qu’il est conçu, fait plus qu’accentuer une tendance. L’homme, selon moi, n’est pas mesquin par nature. L’anonymat, la distance, la solitude de l’internaute vissé à son écran – cette fenêtre ouverte sur le vide –, le relativisme des univers numériques, font qu’Internet délie plus qu’il ne lie. Nos voix, aussi singulières soient-elles, se perdent dans un brouhaha de plus en plus inaudible, sans vraiment se croiser. Ah ! Nous finirons tous comme le cheptel humain du Successeur de pierre de Jean-Michel Truong : débranchés par les Machines !

En attendant ce funeste jour, courtoisie oblige, je te laisse le mot de la fin. As-tu quelque chose, d’inoubliable et de fou, à déclarer aux âmes égarées qui échoueront sur ces transhumains rivages ?... 

 

SB : Je te laisse la responsabilité de tes trolls vengeurs ou sarcastiques, mais dis-toi que tu participes peut-être au bruit blanc, ce faisant. Sinon, en guise de conclusion, et bien, courtoisie oblige, donc : merci d’être passé ^^

 

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Rappel

Ma critique de Chromozone et des Noctivores.

Le texte de Bruno Gaultier sur Chromozone.

Mon article consacré à La Cité nymphale.

La première partie de l’entretien.

La deuxième partie du même entretien.

 

 

Illustrations (tirées de Chromozone et de La Cité nymphale) © Corinne Billon

Commentaires

  • Une petite question pour Stéphane : ta trilogie, même si elle renouvelle le genre et se démarque des poncifs habituels, s'inscrit dans le domaine fort prisé de la SF post-cataclysmique. As-tu, à l'occasion de la rédaction de tes ouvrages, lu ou relu quelques classiques et si oui lesquels ?
    Je pense par exemple à l'école britannique (Wyndham, Christopher et surtout Ballard) ou même à certains Français (Andrevon, Pelot...).
    Merci !

  • Bonjour Philippe.

    Voilà une question intéressante :-)

    Pendant la rédaction de la trilogie, j'ai justement veillé à ne pas lire de romans similaires ou traitant du même sujet. Bon, en fait, c'est pas vraiment que j'ai veillé "dogmatiquement", de manière disciplinée, à éviter de le faire, mais plutôt que je n'en ai pas ressenti le besoin. Maintenant, je sais que je pourrais aussi inverser le propos, et dire non pas "je n'en ai pas ressenti le besoin" mais plutôt "j'en ai ressenti une certaine crainte". Crainte de réaliser que ça avait déjà été fait, et surtout mieux fait, peut-être ^^

    Donc, pendant la rédaction, je crois que je peux affirmer que je me suis tenu prudemment sur la berge. A l'exception peut-être de la "Malédiction de l'éphémère" de Richard Canal, que je me suis surpris à avoir envie de relire pendant que j'écrivais les Noctivores. Je me souviens aussi que j'avais racheté à peu près à la même époque "Sur l'Onde de choc" de Brunner, et qu'il est resté sagement sur la bibliothèque en attendant que je me sente capable de m'y replonger après avoir fini la trilogie. Réflexe et superstition idiote, sûrement, puisqu'en définitive, ce livre n'a pas grand chose à voir avec ma trilogie. Mettons ça sur le compte d'un instinct de conservation mal géré :-)

    On peut donc dire que c'était une posture défensive. Pour ne pas me sentir influencé, ni en plein, ni en creux.

    Cependant, en tant qu'héritier de ce que j'appelerai ici la culture de la déglingue, bien entendu que j'étais forcément influencé par des lectures ou visonnages antérieurs. Comment y échapper ? Je pense à "Inner City" de Jean-Marc Ligny, "Le Marteau de Verre", de K. W. Jeter, mais aussi le premier "Mad Max", ou "Planète Hurlante". Pas forcément des piliers du genre, donc, mais des choses qui m'ont marqué, dont j'ai apprécié le point de vue.

    Je ne sais pas comment travaillent d'autres auteurs, mais voilà une question que j'aimerais leur poser : comment gérer intimement les influences que l'on pressent au bout de ses doigts au moment d'écrire ? ^^

    Voilà, en espérant avoir répondu à ta question.
    Sinon, n'hésite pas à revenir à la charge :-)

    ____
    sTeF

  • Merci pour ta réponse.

    Parmi les classiques auxquels je pensais, je n'aurais pas été étonné que tu cites "le Rat blanc" de Christopher Priest, qui décrit un Royaume-Uni ravagé par une sordide guerre ethnique suite à l'envahissement du pays par des réfugiés Africains... Ou encore le dyptique d'Octavia Butler, "La parabole des talents" et "La parabole du semeur" avec son Amérique barricadée...

    A propos de Ligny, son "D.a.r.k" est pas mal aussi dans le genre.

    Bah les sources sont infinies !

  • Il y a encore plein de choses à dire et à penser avec ce que vous avez encore dit là, Transhu et Stéphane!
    D'abord la question con: Stéphane, comment sauver l'idée de responsabilité (défendue ici) avec la question posée dans une précédente partie de l'entretien: faut-il vraiment sauver l'individu? Qui pour assumer des actes, en revendiquer l'autorité et en accepter le poids de conséquences, sinon une unité minimale de volonté et de pensée qui serait... l'individu?

    Ensuite, pour la blague toujours: sur les comportements suspects sur internet, j'avais intitulé deux textes "l'agir connificationnel" sur Systar, je m'étais bien amusé à les rédiger, en montrant que la discussion internet, contrairement à la communication habermasienne qui participe à la genèse de la subjectivité et permet à chacun de progresser sur le plan éthique (bel angélisme de ce cher Jürgen!), rend con, connifie des gens qui, en réalité, ne se comportent pas si mal... Preuve: Transhu lui-même, l'ombre virtuelle d'Olivier! Le premier est détesté sur le web (on l'a vérifié lors de certaine séance dédicaces récente... héhé...), le deuxième, foi de Systar, est bien plus cool!

    Et, last but not least: pour ceux qui redemandent du Beauverger lu et déformé par les lunettes messianisantes du Systar, l'article sur Les Noctivores est en ligne... Et celui sur la Cité Nymphale, après une petite mise au point taguieffienne sur Lindenberg, arrivera dans deux ou trois jours, il est presque achevé!

  • - La connification t'emmerde, Bruno.
    - Mais, Olivier, je ne voulais pas...
    - Shut your fucking mouth, scumbag !
    - Hé !
    - Argh ! Sors de ma tête, créature démoniaque !
    - Fucking piece of bullshit !
    - Nooooooon !

  • Ah oui, en écrivant ça, j'avais oublié que tu adorais le thème de la schizophrénie, héhé... Mais non, la connification ne m'emmerde pas, elle m'aime, je m'y soumets parfois de bonne grâce.

  • " (...) la discussion internet (...) rend con, connifie des gens qui, en réalité, ne se comportent pas si mal... "

    Comment ?
    Internet ne serait qu'une nouvelle version de l'ancien mode de transport baptisé automobile ? Mais je vois pas le volant !

    Je veux croire depuis longtemps que la bêtise crasse qui semble animer le mâle au volant de sa tuture (à croire que, par quelque étrange phénomène de porosité épidermique, le sang permettant à son cerveau de fonctionner passerait de ses mains à son volant - oh la belle métaphore érectile qui plairait à Cronenberg, que ce volant-corps caverneux gorgé des fluides de son conducteur - le ramenant inopinément à cet état de bête en rût prête à enfourailler tout ce qui bouge), cette bêtise crasse donc se croit dotée d'une certaine impunité du fait de la trompeuse armure de la carosserie. L'homme enfermé dans sa boîte à roulettes équivaurait à l'homme enfermé devant son cube en couleurs ? Ô refuges étranges de l'illusion !

    A moins que, sans ces petits boucliers illusoires, nous ne nous autorisions pas à nous laisser à notre véritable nature de connard définitif ? ^^

  • Ah, cher Stéphane, sur les ravages de l'automobile, lire l'incroyablement féroce article de Léon Bloy dans le numéro 1 de la revue "La Nuit"... J'en parlerai bientôt - avec extraits à l'appui -, ça vaut son pesant d'or !

    Un volant érectile ? Ah oui, Cronenberg adorerait ! Savais-tu qu'il avait eu le projet, pendant longtemps, de réaliser un film sur Ferrari, Red Cars ?...

    Bruno, tu ne crois pas si bien dire. D'ailleurs - tout se recoupe -, l'autre soir, Stéphane me disait trouver un peu schizo ce dédoublement compartimenté de la personnalité (Galaxies et la vraie vie d'un côté, l'inhumain Transhumain de l'autre). N'empêche, j'ai bien ri, après cette fameuse séance de dédicaces, quand certaine jeune forumeuse, découvrant après une heure d'agréable compagnie - certes légèrement arrosée - que le Transhumain, cet être abject, l'Ennemi numéro 1 des forums de SF, c'était moi, a failli en faire une crise de nerf !
    Mais, plus sérieusement, il s'agit surtout de ma part, comme tu le sais, d'un jeu, d'un rôle - d'un masque, aurait dit Nietzsche. Quand je fais pleuvoir les insultes sur les malheureux trolls comme Dieu les sauterelles sur l'Egypte, c'est un personnage que j'incarne, créé de toute pièce et qui, contrairement au petit dialogue jekyllien ci-dessus, n'a jamais, à aucun instant, pris le contrôle...
    - C'est ce que tu crois, gniarf gniarf gniarf !
    - Argh, ça recommence ! Sors de mon crâne, monstre !
    - Jamais ! Mohouhahahaha !

  • A moins que, Stéphane touche cette idée du doigt en parlant de bagnoles, le foruming et le trolling ne soient devenus des sports... un peu comme le rallye ou la F1. Canalisation de la violence, jugulation de la bêtise propre à chacun par la participation à un plan de jeu (le fameux "système de jeu" dans les sports collectifs!), voilà un peu l'un des intérêts sociaux du sport... Le foruming, les jeux en ligne (j'en sais quelque chose, moi qui subis parfois nocturnement, dans mon cybercafé de la rue Soufflot, les tournois de World of Warcraft fort animés...), deviennent des sports. En foruming, je suis de tempérament défensif, en basket: offensif (demandez aux boss du blog Hotwine Brothers de vous en parler, de mes perfs sur le playground de Pernety!). Transhu est l'attaquant de pointe, le Drogba/shevchenko de la SF française.
    Il me reste maintenant à élucider le problème de ta schizophrénie, Olivier, qui s'applique d'ailleurs à pas mal de choses (faire le réac chez les gauchos, et faire le gaucho chez les réacs; être capable de théoriser le phénomène sociologique quasi-chromozonique de la "chieuse", et pourtant en adorer les incarnations singulières, etc.)

  • "N'empêche, j'ai bien ri, après cette fameuse séance de dédicaces, quand certaine jeune forumeuse, découvrant après une heure d'agréable compagnie - certes légèrement arrosée - que le Transhumain, cet être abject, l'Ennemi numéro 1 des forums de SF, c'était moi, a failli en faire une crise de nerf !"

    Ah, ah ah, ah !
    Excellent !!!
    J'a-do-re ce genre de situations qui nous forcent à réévaluer nos points de vue préconçus. Me rappelle l'excellente soirée que je passais il y a fort longtemps, en des années de folle jeunesse qui s'éloignent de plus en plus vite, avec un très agréable individu amené par un tiers, et qui s'avéra appartenir aux Compagnies Républicaines de Sécurité.

    Pour que l'anecdote soit complète, je me dois de préciser que je recroisais l'individu en question un ou deux années plus tard dans les coulisses d'une manifestation entre Bastille et Republique. La rencontre fut des plus cocasses, entre le chevelu barbu cuiru d'un côté, et la tortue-ninja bottée casquée de l'autre. Serrage de main entre les deux représentations visuelles des camps ennemis, sous l'oeil stupéfait des autres tortues à travers les vitre de leur car, ET des autres porteurs de banderolle qui passaient par là. "Sûrement un RG en infiltration", ont dû penser à mon endroit les deux moitiés de spectateurs :-)))

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  • Plaît-il ?

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