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Barn Owl, V - oeuvre au noir

Barn owl, V, oeuvre au noir

 

Quatre mois. Quatre mois que j'aurais dû poster cette chronique sur le merveilleux webzine swqw. Trop court pour une gestation. Trop long pour un accouchement. Comme le prosateur hermétique, replié chaque jour davantage dans sa tanière aux volets fermés, secret zélateur de saint Procrast, comme cet automne diluvien qui s'étire au-delà de toute décence jusqu'en Angoumois, le nouvel album du duo de San Francisco formé d'Evan Caminiti et Jon Porras semble n'apprécier que les états intermédiaires et n'évoluer que dans les interstices du réel, là où s'effilochent nos rêves et où les premières sensations de l'éveil ont encore la consistance des songes. V est le disque de l'entre-deux, la musique géostationnaire d'une aube qui n'en finit pas et d'un crépuscule sans fin. Jour drapé d'éclipse. Nuit nimbée d'aurore. Tout commence comme si rien n'était encore achevé, avec les nappes synthétiques dark ambient de Void Redux. Comme le désir, le vide n'est pas un manque mais un état. Il est constellé de matière-fantôme – particules en veilleuse, présentes mais indétectables, latentes ou virtuelles, qui n'accèdent à l'existence – à l'incarnation dixit Etienne Klein – qu'à la seule condition de recevoir l'énergie nécessaire. Ce à quoi s'échine notre Chouette effraie, qui ne niche pas dans les clochers pour rien... D'abord, nous ne percevons que ressac de drones et rythmique d'outre-tombe. Mais déjà résonnent sons concrets, guitares et synthés – musique du champ quantique et chant du Plérôme. D'où vient dès lors, avec The Long Shadow, l'ombre qui lentement nous recouvre ? Crépitement saturé, guitares angéliques, sons synthétiques ambient et drones nous tiennent à distance égale de la ténèbre et de la lumière. Commence alors un combat contre la nuit aux accents timheckeriens. L'entre-jour sera long... Du synthé spectral de Blood Echo qui enfle jusqu’à emplir tout notre champ sonore comme le flux de nos artères après une nuit d'insomnie, aux ambiances earthiennes de Pacific Isolation, dont la guitare claire de leurs débuts s'augmente bientôt de drones et d’accords électriques godspeediens, Barn Owl nous parle de l'équilibre cosmique et de sa connaissance des choses cachée – son desert rock drone doom psyché dub folk relève à n'en pas douter de la science alchimique. The Opulent Decline, le long (17 :32) et dernier morceau du disque, réalisé à partir d’une improvisation d’une demi-heure, achève en apothéose l'oeuvre au noir. Les guitares rappellent Richard Pinhas, l’harmonie entre nappes synthétiques, guitares et drones est superbe et, tandis que décline l'éclat conjugué de la lune et du soleil soniques, nos Ombres viennent à notre rencontre.

 

Barn Owl, V (label Thrill Jockey, avril 2013)

Lire aussi la chronique de Lexo7 (qu'il me pardonne) sur swqw.

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